mardi, juillet 30, 2002

Beaucoup d'effort pour peu de résultats...


Presser les ressources vitales

Ces disciples entrent, pour certains, dans une retraite collective de trois années. Ils continueront le plus souvent par une deuxième retraite, toujours de trois années. Après cette expérience de presque sept ans, ils s’installeront au monastère qui les accueille, à côté. Ils y seront admis s’ils adhèrent à la stricte abstinence officielle et adoptent la robe des moines. Puis le temps passera, les années défileront...

Le dogme fait souvent porter à ces disciples, devenus quinquagénaires, le poids, voire la responsabilité de la non-histoire qui s’est déroulée. Parmi eux, quelques-uns ont connu de bonnes expériences de méditation. Ces moments d’intensité étaient, disent-ils, variés, remarquables, mais... où est donc passée cette stable illumination qu’ils recherchaient ? Un eurolama aux cheveux blancs, issu précisément de ce système, me le confirmait dans un soupir :
« beaucoup d’efforts pour peu de résultat... »

Après l’engagement et ses années au monastère, les méditatifs s’avèrent précocement fatigués par une vie sédentaire. Ils sont devenus plus lucides vis-à-vis de cet engagement qui, au fond, ne pouvait pas tenir ses promesses merveilleuses.

Ceux qui n’ont plus d’illusions choisissent rarement de prendre la parole. Il y a plusieurs raisons. D’abord ils se convainquent qu’ils portent eux-mêmes la responsabilité de cette déception ; c’est d’ailleurs dans le message bouddhique une dimension essentielle. De plus, ils sont encouragés au « secret du tantrisme », excellent moyen de garder closes les lèvres de ceux qui ont une expérience « contrastée »... Enfin, pour garder sa place au monastère, il ne faut pas faire trop de « vagues » à l’extérieur. Les bouches sont donc scellées par la peur d’être exclues. Rien ne filtrera ainsi.

Pourquoi restent-ils ?
Ils demeurent dans la communauté, car ils n’ont pas aujourd’hui d’autres opportunités de recommencer leur vie ailleurs. Leur santé est devenue plus délicate à l’issue des retraites. Leur vitalité a diminué en l’absence d’exercice physique quotidien. Parce que le tantrisme et ses yogas secrets nécessitent de l’énergie et beaucoup de juvéniles ressources, certains de ses pratiquants vieillissent souvent un peu plus vite. Et, à quarante-cinq ans, cinquante ou cinquante-cinq ans, comment refaire sa vie ?

Au monastère, ceux qui peuvent encore s’en aller le font. Parmi les plus jeunes et les plus vaillants, on quitte aujourd’hui abruptement la robe pour se mettre en ménage avec une compagne ! Récemment ces vies sentimentales ont fait des émules. Il semblerait que ce soient les plus verts, les plus capables et les plus avenants qui trouvent chaussure à leur pied, et qui s’en vont en couples écrire une nouvelle page à leur histoire.

Externaliser les personnes âgées
Un dispositif « d’outsourcing » (externalisation) pourrait-il bientôt se mettre en place ? Ce grand monastère européen est plein. Il ne reste plus de cellules libres. Ses ressources financières sont insuffisantes. L’endettement en menace la pérennité. Les citoyens craignent que l’harmonie de la vie rurale ne soit altérée par le repli communautaire des robes prune et la croissance géométrique de leurs effectifs.
Alors, comment caser la troupe des moines juniors qui sortent, tous les trois ans environ, des retraites situées à proximité ? Ce sont les plus mobilisés, les plus disciplinés, et donc les plus capables de faire « l’offrande de leur corps, de leur parole et de leur esprit » au protecteur courroucé[1] de couleur noire transmis par ce lignage.

Pour intégrer pendant quelques années ces jeunes eurolamas, tant qu’ils sont tout dévoués à la conquête des terres pures, tant qu’ils sont dociles envers leurs maîtres, la hiérarchie du monastère imagine actuellement un « roulement » des moines. Les modalités de ce « roulement » ne sont pas finalisées. Il consisterait, s’il est mis en œuvre, à faire partir des moines établis au monastère depuis longtemps, et à céder leurs chambres à des eurolamas juvéniles issus directement des retraites.

L’institution gagnerait de la force !
Elle rajeunirait avec chaque promotion de nouveaux, si riches encore d’énergie et de vitalité. Elle se déresponsabiliserait simultanément : le même nombre de moines plus âgés et moins actifs partirait. Ces derniers ne vieilliraient pas au monastère...

Ils ne constitueraient donc pas des charges pour la communauté quand, ayant besoin de soins quotidiens, certains deviendront un jour dépendants, à l’automne de leur vie.

Ces moines aux tempes grises ou blanches se retrouveront-ils bientôt à la rue ? Ils n’ont pas toujours leur permis de conduire. Beaucoup n’ont plus beaucoup d’amis, le temps les a éloignés. D’autres enfin sont déconnectés de l’évolution technologique et sociale, depuis plusieurs décennies.

Nombreux sont ceux qui devraient ainsi renoncer à leurs vœux monastiques (qu’ils avaient pourtant pris « à vie ») et à la robe couleur burgundy... Ceux qui n’ont plus de famille pour les accueillir, ni d’épargne, iront-ils grossir l’océan de la précarité et de la pauvreté ?

Pendant leur séjour au monastère, la plupart n’ont pas eu d’assurance maladie, ni de complémentaire. Ces moines n’ont pas cotisé aux caisses, leur communauté n’a pas cotisé pour eux. La congrégation ne s’est donc pas donnée les moyens d’assurer une protection sociale à ses eurolamas.[2] Ils ne disposeront pas en général d’une pension de retraite, sauf exceptions. Certains demanderont-ils leur couverture à l’aide sociale ? Et quid des moines de nationalités étrangères ?

Comment vont-ils faire pour vivre dans ce monde extérieur qu’ils avaient cru quitter ?
Peut-on craindre dans ce domaine de la spiritualité une multiplication de vocations fatigantes, temporaires et sans avenir ?

Le bonze japonais Ikkyu Sôjun (1394-1481) disait (déjà) dans l’une de ses célèbres poésies en idéogrammes chinois :

« Se faire un nom
en enseignant dharma et méditation
et mépriser l’homme
me laissent sans voix. »

Pour prendre en compte les dimensions humaines, le dalaï-lama semble avoir préféré une autre voie « contemporaine », réaliste et plus séculière vis-à-vis des Occidentaux. Ce n’est peut-être pas un hasard s’il encourage souvent les Européens à garder leur religion, s’ils en ont une !
Il privilégie l’équilibre de la vie sociale, la connaissance des autres cultures, la rencontre des autres traditions, le dialogue avec des scientifiques et des intellectuels, l’accompagnement pédagogique du public par ses enseignements et ses livres...

Ce prix Nobel de la paix affirme même que le bouddhisme ne serait pas une religion, mais bien une manière de vivre ! Il encourage les Européens à exercer leur discernement vis-à-vis des écoles bouddhiques et des « maîtres ». Il conseille aux personnes intéressées de prendre le temps de l’observation —sept années— avant de se lancer comme disciples. Mais, ne parle-t-il pas un double langage très "politiquement correct", moderne avec les Occidentaux, traditionnel avec les disciples ?

Tout comme le catholicisme s’est attentivement remis en question, et ouvert au monde, sans pouvoir cependant enrayer son déclin, les bouddhistes demain auront probablement la même perspective : s’adapter.


VIII
ART & FASCINATION

« Ce n’est pas parce qu’on est convié au festin du lion
qu’on ne figurera pas au menu. »


Comment se laisse-t-on fasciner par l’image sereine et souriante du bouddha ? Sommes-nous comme ébloui par la cohérence de son message, par l’apparence plaisante de son esthétique et par la pureté de son art ? Peut-être associons-nous la noblesse des peuples asiatiques, attachants et sentimentaux, avec l’hypothétique doctrine du nirvana ? Peut-être, avons-nous attribué à cette dernière leurs qualités ? Et comment nos contemporains peuvent-ils projeter ainsi leur désir de perfection vers un simple nom, sésame ouvre-toi de la spiritualité ?

« Bouddhisme » :
Le terme rassure au premier abord. Il semble si convenable, même pour les sceptiques, les intellectuels, les athées. Une doctrine pour ne plus souffrir, une philosophie du détachement de la vie, une vocation sans dieu encourageraient ainsi la sagesse, la non-violence et la paix. Que le bien, en somme. Il y a ce postulat, rarement questionné : ce serait une quête meilleure car non belliqueuse, une voie royale car essentielle et méditative, un idéal remarquable car basé sur le mépris de l’argent, de la carrière et du pouvoir.

On oublie que les minorités tamoules de Sri Lanka ont souffert d’une oppression militaire où un bouddhisme proche du pouvoir politique a joué un rôle. On oublie aussi que les contingents de moines soldats étaient redoutés pendant ces guerres qui déchirèrent l’Extrême-Orient au fil de son histoire.

En Corée, j’ai eu la chance d’apprendre les rudiments du Komdo, cette voie du sabre, d’un expert en cet art martial. Il l’avait reçu, dès son enfance, de vieux bonzes du monastère où ses parents étaient employés comme gardiens. Nous pratiquions sans masque ni armure, et utilisions un sabre courbe. L’arme en acier était redoutable, et c’est sa réplique en bois que nous faisions tournoyer à toute vitesse pour nos exercices. Précision du geste et énergie abdominale (« ki ») étaient cultivées. Notre instructeur nous faisait ses démonstrations, sabre au clair, avec la lame réelle. J’eus parfois le sentiment que ce n’était pas un simulacre spirituel.

Mutile-t-on en Orient de grands bouddhas de pierre qu’un tollé de protestations s’élève en Occident. Ce sont là d’inestimables trésors culturels et artistiques, nous dit cette unanimité. Il semble que l’indignation face aux destructions de ces statues minérales soit encore plus forte que pour le sort des gens, innocents, anonymes, mais bien réels, pris dans les mêmes situations. On a même reproché au dalaï-lama de ne pas avoir suffisamment condamné ces détériorations ! Ce qui est un comble.

Mais que dire de tous ces trésors de pierre que nous avons écrasés ici même au cours de l’histoire, même récente. Que dire même de ces vestiges excavés brièvement avant qu’une autoroute ne les recouvre définitivement ?

« Touche pas à mon bouddha ! » :
Avec son image impeccable, ses moines souriants, sa doctrine élégante, on sent, en Occident du moins, vibrer une secrète corde sensible. Peut-être a-t-on affaire à un archétype de cet inconscient collectif que suggéra Carl Gustav Jung ?

Certains de nos contemporains occidentaux prennent un air soudainement appréciatif, presque gourmand, quand on évoque le sujet du bouddhisme. Les acteurs, les chorégraphes, les artistes ne sont pas les derniers à se réclamer de sa sagesse...

Ainsi ce chanteur de variété dit pratiquer la méditation. Il visite une métropole de province en France. Il se voit proposer une visite au temple bouddhique situé à une soixantaine de kilomètres. Réponse positive de l’intéressé, mais il souhaite que le monastère mette un hélicoptère gratuitement à sa disposition pour effectuer le trajet ! La congrégation contactée jette l’éponge devant les demandes d’autorisation à effectuer et les frais importants à engager pour ce charmant caprice.

Le bouddhisme se base sur l’abandon du désir et l’apaisement des émotions, non sur leurs exacerbations ! Pour ceux qui adoptèrent ce choix de vie jusqu’au bout, la frugalité et la modestie faisaient partie intégrante du chemin. La légende, on l’a vu, rapporte que le prince Siddharta laissa son cheval, son serviteur, le trône qui l’attendait, ses beaux vêtements de cour, pour marcher le long des sentiers et vivre de mendicité.


Le bouddha était s.d.f.
Un récit raconte qu’un jour une femme lui offrit une sorte de beignet cuit à même la braise. Cette cuisinière était si pauvre qu’elle n’avait pas de poêlon pour préparer ses repas. On dit que le bouddha mangea cette nourriture mêlée de charbon sans se plaindre. Aujourd’hui, le frisson du voyage en hélicoptère pour aller à la pagode constitue bien un raccourci, à notre sens saisissant, d’un malentendu.

Une confusion entre quête spirituelle et consommation de loisirs s’est invitée. Jusqu’où va-t-elle ? La bonzerie est-elle un parc à thème exotique et coloré ? Méditer au dojo, est-ce dévaler d’ébouriffantes montagnes russes ? Rencontrer des « réincarnations » de bouddhas vivants à la lamaserie, est-ce assister à la parade de Mickey, Picsou et Dingo ?

N’osons pas en vouloir à nos contemporains de la confusion qui se mêle à la curiosité. On peut comprendre leur innocence, voire leur manque d’une connaissance pratique de ces sujets lointains. L’intensification des passions de la vie est une évidence à notre époque. Il est naturel qu’on la retrouve aussi dans les manières actuelles d’aborder le bouddhisme.

L’admiration ne reste-t-elle pas superficielle ?
Nos contemporains vont-ils laisser leur généreux satisfecit ? Découvriront-ils que certaines pensées bouddhiques, car on a vu qu’il y en a de nombreuses, sont basées sur des textes qui ont un sens, véritablement, comme des contes antiques bien troussés, impressionnants, de ceux qui convertissent les âmes sans en avoir l’air ? Contrairement à l’idée reçue, il y a aussi un désir de transformer l’autre, puissant dans certaines écoles basées sur la dévotion. Reconnaîtront-ils que les promesses de vies successives et de paradis après la mort ne sont pas d’une nature si différente de celles de résurrection du christianisme ?

Qu’on interroge ainsi en des termes négatifs les excès suscite généralement l’incrédulité. Nous imaginons certains de nos lecteurs protester avec un zeste d’indignation : « vous n’y pensez pas, le message de Sakyamouni, c’est justement le sourire, la non-violence et la sagesse. Vous n’y avez donc rien compris ! »

C’est la victoire, à l’ouest, du bouddhisme
C’est un signe de la puissance de sa fascination. Nos contemporains supposent que son message est homogène, qu’il ne peut pas être habité, ici ou là, par des forces... ordinaires. Le bouddha étant l’archétype de la sagesse, il ne peut être question que sa brillante statue cache aussi, comme ailleurs, des réalités... moins reluisantes ! Grâce encore à la confusion entre le nom du bouddha et ce qu’il désigne, on imagine que, là, tout sourit, et pour toujours. Point final. C’est ce qu’on pourrait appeler « l’exception culturelle bouddhique ». Elle échapperait à la médiocrité par l’évidence des signes.

L’art, la statuaire, la politesse exquise des derniers authentiques lamas venus de l’Himalaya, la saisissante perfection des mandalas de sable, la grandeur de rituels admirables, la précision des anciens traités psychologiques : la liste est sans limite. Nos contemporains ne réalisent pas que la statue, la présentation agréable, le livre canonique ne constituent pas la tradition la plus intéressante. Ils ne voient pas que cette dernière s’incarne surtout à la base dans des humains d’aujourd’hui bien réels.

Telle jeune réincarnation supposée d’un « bouddha vivant » était friande, lors de sa première venue en France à l’âge de dix-sept ans, des hamburgers de chez Mac Donald’s qu’il mangeait ostensiblement dans un de ces magasins de restauration rapide ! Par ses entretiens, on savait de cet adolescent aux traits délicats qu’il aimait aussi la pizza hawaïenne, qu’il surfait sur la toile, et qu’il écoutait les tubes des Spice Girls !
On entendit dire un jour qu’il avait trompé la vigilance des moines qui l’accompagnaient pendant quelque sortie en ville. Ces derniers ne finirent-ils pas par le retrouver, feuilletant en public des bandes dessinées à la F.N.A.C. ? Un jeune homme bien de son époque, en somme.
Vous confieriez-vous à son bon goût pour votre méditation quotidienne ou vos questions subtiles de métaphysique ? Abandonneriez-vous le monde et ses attachements pour le suivre ?

Dans la même lignée, un autre lama « réincarné » est plus célèbre encore pour ses frasques accomplies quelques décennies plus tôt. Il arrive au Royaume Uni comme boursier Spalding. Ce jeune moine y découvre les tentations de l’Occident, en particulier l’alcool.
Ses disciples britanniques supposent bientôt qu’il dialogue en direct avec les divinités de sagesse... On le retrouve en effet étendu de tout son long, les bras en croix, sur le carrelage de la salle de bain en train de psalmodier des mantras.

On raconte qu’il défonce un soir à vive allure la vitrine d’un magasin de farces et attrapes avec une puissante automobile, après avoir perdu conscience au volant, sans doute également dans un état d’ébriété avancé. Cet accident lui laisse d’ailleurs des séquelles physiques. Il émigre aux Etats-Unis après avoir abandonné sa robe de moine, s’être marié à une élève âgée de seize ans, être devenu fumeur et buveur invétéré. Il fonde une communauté, puis décède...

Celle-ci connaîtra une crise dramatique, lorsque le disciple américain qu’il a choisi pour prendre sa suite cache sa séropositivité à ses amants, et contamine du virus V.I.H. un jeune homme. Lorsque ce dernier infecte à son tour une jeune femme et que ces deux disciples décèdent, on demande au dauphin du lama tibétain pourquoi il n’a pas pris de précaution pour ses rapports sexuels. Il répond en substance qu’il était persuadé que son maître leur donnait une protection spirituelle qui les préserverait aussi de cette maladie.

Cette croyance en une protection surnaturelle ne doit pas être vue comme une aberration minoritaire. N’est-elle pas répandue parmi les sympathisants occidentaux du lamaïsme ? Pourrait-elle inciter d’autres disciples, hélas, à d’autres prises de risques ?

Pour jauger de notre bouddha, il ne s’agit pas tant d’admirer le galbe ou le drapé de la silhouette de pierre, la suavité du sourire. Il faut bien regarder vivre les hommes et les femmes qui prétendent l’incarner, le défendre, l’enseigner, le transmettre.

Récemment je me rendis au cinéma, afin de me détendre
Je sortais d’une longue réunion dans l’établissement public où j’enseignais. Mais je me sentais un peu honteux d’aller voir si banalement le dernier « James Bond ». Heureusement on allait me déculpabiliser. Dans la salle, je vis en effet un moine, appartenant à une congrégation d’eurolamas. Il venait lui aussi se divertir. Il avait quitté sa robe rouge pour la soirée, la troquant pour une paire de jeans. Il faisait ce soir-là cent vingt kilomètres aller-retour, pour le dernier « James Bond », avec sa voiture personnelle, depuis son monastère situé à la campagne. Et, bien entendu, il avait son téléphone portable à la main !
Je me suis dit que si des moines du bouddha vont voir « James Bond », j’aurais bien tort de m’en priver.

Il a fallu me rendre à l’évidence après toutes ces années
Le mythe du bouddha que j’avais entretenu a cédé face à des hommes et des femmes qui l’incarnent, et à ce puissant désir de vivre qu’on retrouve paradoxalement chez eux. La banalité m’a finalement réveillé du rêve et de son nirvana sur papier glacé. Était-ce mieux qu’ailleurs ? Comme me le disait, avec un zeste d’humour, un autre eurolama : « tu critiques notre monastère, mais ce n’est pas mieux dans les entreprises ». Certes, mais dans la vie dite ordinaire, nous ne prétendons pas être des sages.

Contredisant nos désirs de consommation spirituelle, l’éternité et le nirvana, s’ils existent, ne sont probablement pas tout prêts à l’emploi. Or il s’agit bien de réchauffer la barquette de la sagesse aux micro-ondes d’un nouvel engouement occidental. Mais à y bien regarder, le bouddhisme réel a d’autres odeurs que celles de l’encens... Cela ne sent-il pas, comme ailleurs, la sueur, l’ambition, la lutte, l’argent, l’alcool et le sexe ?

Allez dire cela à l’époque du « politiquement correct », à des Européens conquis à juste titre par le sourire avenant du dalaï-lama à la télévision, à des lecteurs fondant au contact des jolis livres de photos de l’Himalaya ! Tant pis, nous allons passer pour quelque rabat-joie chez celle ou celui en qui le nirvana éveillait un mystérieux et délicieux frisson oriental !

L’épée de Damoclès
Qu’il n’y ait pas eu, en effet, ici ou là, de plaintes de quelques anciens aspirants, ou de leurs familles, est une énigme, voire un miracle, du point de vue de ces communautés bouddhistes apparues depuis les années 1970. Elles ont traversé sans grands ennuis la période « baba cool », la période « new age » des années 1985 à 1995, pour entrer dans la période de recomposition communautaire... Qu’il n’y ait pas eu encore de véritable scandale en France atteste de l’excellente image, en particulier médiatique, qui protège encore la tradition de Sakyamouni.
Les disciples ont d’abord bénéficié de la présence de communautés asiatiques intégrées, tranquilles et bienveillantes, puis de quelques véritables maîtres réputés venus d’Asie, d’une cause tibétaine sérieuse, d’érudits occidentaux motivés et sincères et d’un dalaï-lama se présentant d’une manière impeccable, ouverte sur le monde.


Mais l’arbre cache la forêt.
Tout n’est pas aussi simple dans les « nouveaux » mouvements religieux. Nous n’allons pas présenter une opinion personnelle sur ces délicates questions. En revanche, en France, la très officielle commission parlementaire d’études sur les sectes avait « épinglé » dans sa longue liste rendue publique quelques initiatives qui se réclament du bouddhisme. La liste peut être consultée aisément sur Internet. Certaines dénominations, inscrites au 22 décembre 1995, évoquaient des traditions d’origine himalayenne (1), des mouvements d’origine japonaise (2), ou d’autres institutions (3). Voici quelques noms extraits de cet inventaire (issu en particulier des informations fournies par les Renseignements Généraux). Ils sont cités, ci-après, entre guillemets. Les formes orthographiques retenues par le rapport parlementaire pour désigner ces groupes ont été reproduites telles quelles y apparaissent :


1) « Dakpo Shampa Kadgyu »
« Ogyen Kunzan Choling »
2) « Kofuku nokagaku »
« Reiyukai »
« Soka Gakkai » (l’UNADFI a indiqué en plus « Nichiren Soshu » dans le rapport de la commission parlementaire)
3) « Paris Dharma Sah - Lotus Sangha of European social buddhism »

Les rapporteurs recommandaient en substance l’application d’une sorte de principe de précaution en relation avec les groupes qu’ils avaient listés. Les choses ont-elles changé depuis la publication ?

Lorsque nous étions moine novice dans un monastère construit en Europe, sa tradition himalayenne et le renom de son vieux lama avaient attiré de nombreux nouveaux bénévoles. À table, au réfectoire, je découvris ainsi que les chemins de ces camarades étaient divers.

Certains avaient fréquenté des groupes « new age »
Quelques années plus tôt, l’un d’entre eux avait été serveur. Il préparait des infusions d’hibiscus dans un vieux moulin transformé en restaurant végétarien, où affluaient les sympathisants nouvel âge de la région. Parmi ceux-ci certains, vêtus d’amples vêtements blancs, gardaient barbe fournie et cheveux très longs. Quelques années plus tard, l’employé était devenu moine du rite « tibétain » dans ce monastère
Un autre moine, quant à lui, m’avait avoué qu’il s’était vivement intéressé au vaudou avant de lui préférer le lamaïsme.

Un des meilleurs conducteurs d’engin du chantier monastique arborait fièrement, quant à lui, un tee shirt sérigraphié « Nouvelle Acropole », et il était un des anciens de ce mouvement. Enfin un autre de ces compagnons avait bien séjourné comme résident au « Mandarom ».
Les deux derniers noms d’institutions que nous venons d’indiquer figurent sur cette même liste du rapport de la commission parlementaire d’études sur les sectes.

Il semble donc que le bouddhisme d’aujourd’hui n’existe pas en suspension dans l’éternité, et qu’il soit un reflet de son temps. Ses pratiquants peuvent avoir circulé dans diverses initiatives. Sectes ou pas, les voies de passage existent qui relient les communautés bouddhistes et les nouveaux mouvements religieux par l’intermédiaire de disciples qui goûtent successivement à plusieurs expériences.

Nos contemporains en Occident ne disposent pas encore de tous les éléments d’appréciation nécessaires. Et qu’il y ait, ne serait-ce qu’un ou deux problèmes sérieux médiatisés en Europe, suffira sans doute à faire mûrir plus rapidement l’opinion publique.
Si un suicide de sympathisant d’un de ces cultes défraye la chronique ?
Ou si la mort inopinée d’un jeune retraitant se produit dans le froid persistant d’une retraite collective, ou parce qu’on a tardé à soigner une banale infection dentaire ? Il est clair que les « enseignants » des centres les plus clos sur eux-mêmes, devront alors rendre des comptes et assumer une nouvelle responsabilité. Car la judiciarisation de la société est une évidence, et les familles seront sans doute moins passives à l’avenir, disposant d’associations pour les représenter et les soutenir.


Cela affecterait bien entendu l’image du bouddhisme, son statut de sagesse rarement discuté. Les médias adorent brûler ce qu’ils ont promu et adoré. C’est que l’audience est nombreuse à célébrer l’humiliation de ce qui a été mis préalablement en scène. Un scandale en robe de bouddha : l’audimat en frémirait ! Après avoir été la cerise sur le gâteau, les convertis pourraient bientôt se retrouver dans le collimateur de l’opinion. « Conditionnement », « rabâchage », « manipulation mentale », « gourou », « travail illégal » : les mots sont prêts. Ce n’est pas parce qu’on est convié au festin du lion, qu’on ne figurera pas au menu.


IX
NÉO FONDAMENTALISTES[3]

Ces hommes, nés sans doute pour être beaux, car toute créature a sa beauté relative, se sont enrégimentés dès l’enfance, sous le commandement de la force, sous le règne du marteau, des cisailles, de la filature, et se sont promptement vulcanisés.
Honoré de Balzac, « Scènes de la Vie Parisienne. »

Exposé en Occident, le bouddhisme constitue l’indispensable présentoir de ce qu’il est. Il est donc utile aujourd’hui. Tel quel, il se montre, dans sa diversité, dans ses insuffisances, dans ses contrariétés et dans ses paradoxes. Les Européens le découvrent, le comprennent et l’apprennent ainsi.

Les bouddhas d’Hollywood, l’image souriante du dalaï-lama, les ors et les encens des autels n’auront donc pas l’exclusive à terme. Les Européens découvrent des réalités, des clergés, des vies sociales, des mœurs, des relationnels, des « intrigues ». Ils ne se feront guère d’illusion à l’avenir après quelques contacts un peu moins édifiants. Ils auront peu à peu une connaissance vécue et de première main de ces traditions orientales adaptées ici, en en fréquentant les représentants, les usages, les pratiques, et en en découvrant les secrets, petits et grands...
Bien sûr les communautés des nouveaux mouvements religieux (n.m.r.) communiquent beaucxoup dans un monde où c’est l’usage. Elles jouent sur les couleurs, les idées nobles, les appels à la sérénité et le sourire des bonzes, c’est-à-dire sur des signes faciles à reconnaître par toutes et tous.
Certaines vont jusqu’à réécrire leur histoire, à en gommer un schisme, quelques conflits et donc des pans entiers, pour faire coïncider l’image et la « réalité ».
Mais chacun découvrira sans doute, au fil de son exposition aux voies délaissées par la vie asiatique, qu’elles visent aujourd’hui surtout à se promouvoir elles-mêmes. La vitesse à laquelle les Européens apprendront à décoder ces parts d’imaginaire et à percevoir les réalités sociales d’un bouddhisme pluriel est l’inconnue.
Maintenant ou plus tard, nous verrons bien. Il faudra sans doute plusieurs décennies de plus pour voir où sont les illusions en filigrane des présentations avantageuses de cette quête orientale sûre d’elle-même. Il faut donc supposer et permettre que nos contemporains prennent leur temps pour ces décodages et peut-être pour quelques désacralisations... Ils ne semblent pas « pressés ». Et il y a de bonnes raisons à cela.

Le dernier des mythes antiques
En effet, c’est le dernier mythe antique, ou l’un des derniers encore à notre époque... Il porte donc cette qualité si particulière aux allégories. On attribue une omnipotence, une sagesse, au sourire évocateur de la sérénité. On désire trouver « cela » pour de vrai. C’est si essentiel. On aime à penser que sur la Terre il y a encore des sages, des nobles bouddhas, ou de joyeux yogis éveillés dans leur caverne himalayenne.
Les hommes, les femmes qui s’éprennent de ce retour possible à une paix intérieure dans un monde agité désirent y croire. Ils préservent à notre époque rationaliste cette part plus jeune d’eux-mêmes, ce regard qui est de la nature de la foi, ce frémissement délicat qu’ils ressentent encore face au mystère. Ne leur prenons pas le meilleur d’eux-mêmes !

La déception réaliste n’a donc pas de place dans cette nostalgie d’une vie harmonieuse. Ce constat serait l’échec de leur nouvelle aspiration. Le désir de spiritualité va prendre corps éventuellement avec les expériences de méditation agréables bien que passagères. Ce plaisir mental renforcera les convictions. Il convient alors de chérir la spiritualité la plus intense, celle qui apporte le plus de confirmations du type : « ça marche ».

Qu’importe alors les réalités humaines qui entourent ce mieux-être, qu’importe les petits défauts perceptibles peut-être dans certains des groupes qui proposent cette « sagesse » : si des nouveaux fidèles sont séduits, ils évitent de se soucier des « cuisines » de leur belle histoire.

Il leur est suggéré, voire répété qu’il ne faut pas dédorer l’idée du bouddha qui les remplit de contentement et d’espérance. Pour que le bénéfice spirituel perdure, il ne doit pas être terni par l’examen critique des autres, et surtout bien entendu de leurs instructeurs éventuels. Et la tradition de l’illumination bénéficie aujourd’hui de cette faveur. « La vision pure », tel est souvent le nom donné à ce parti pris éthique. Chaque sympathisant doit considérer que ses constats critiques ne sont que le reflet de son propre esprit confus et négatif.

Contre l’évidence, contre les faits eux-mêmes, il faut donc s’attendre à ce que certains de nos contemporains ne se laissent pas ôter le nouvel idéal. Ils veulent la garder, la lampe d’Aladin qui exaucera leur besoin de sérénité !
Si cette utopie s’avérait décevante, elle constitue quand même une satisfaction importante pour ceux qui lui donnent leur aspiration voire leur projet personnel.

En grandissant en expérience, les nouveaux sympathisants comprendront mieux en quoi leur foi ressemble peut-être à celle qu’ont les jeunes enfants pour le père Noël. Mais aujourd’hui ils préfèrent la douceur du songe coloré, la candeur de l’idéal, la possibilité de la béatitude, la sécurité des promesses « au-delà de la mort. » Il leur faudra donc user leur évidence de perfection, l’user jusqu’à en percevoir la trame.

Recherche de vérité versus religiosité
Mais la déception possible des disciples n’use pas l’idéal lorsque celui-ci est bien assumé. Sa possible dignité humaine s’exprime aussi au travers de quelques personnalités contemporaines remarquables. On trouve ces flambeaux tant dans le Théravada, que dans le zen et dans le Vajrayana avec, par exemple, le dalaï-lama. Pour ce dernier, des travaux récents semblent cependant suggérer quelques contradictions inquiétantes entre le message qu'il communique et la pratique rituelle de Kalachakra dont il se réclame un praticien orthodoxe... Voir à ce sujet le livre essentiel de Vicor & Victoria Trimondi, en accès gratuit et texte intégral - traduction anglaise : http://www.trimondi.de/SDLE/Index.htm
Il n'en reste pas moins que dans chacun des trois véhicules, des personnes exceptionnelles mettent, chacune à sa manière, l’accent sur la charte du libre discernement qu’a promulguée le bouddha (l’extrait est présenté au chapitre III de ce livre), c’est-à-dire sur l’expérience individuelle et sa faculté autonome de penser.
C’est sans doute ce que beaucoup de nos contemporains exigent de leur culture intellectuelle, sophistiquée et naturellement critique. La méditation est d’autant mieux pilotée que l’individu est capable d’en comprendre l’expérience par lui-même.

Mais, face à ce libre arbitre bienvenu qui encourage les « libres penseurs » de cette culture spirituelle orientale, d’autres écoles ne renoncent pas à leurs structures hiératiques en quête de moyens de subsistance, à leurs voies fascinantes par leur sobriété ou clinquantes par leur liturgie. Cette dernière encourage un retour à des formes plus populaires. Elle utilise aussi l’adhésion inconditionnelle des disciples comme un élément fédérateur et dynamisant pour le groupe. Assis sur un haut trône, ceint d’une étole fourrée, un maître du tantra renvoie à l’époque plus ancienne où la condition de dévot était proposée par des civilisations sacerdotales.
Moins philosophique, moins « humaniste », la cérémonie, accomplie dans sa langue d’Asie, fait revenir au temps des grandes fêtes calendaires, des communautés soudées, des atmosphères ferventes. Ce qui attirait pourtant les Occidentaux en quête d’Orient était, il y a quelques décennies encore, la conquête d’une liberté spirituelle, l’espace de sagesse à retrouver en soi. Aujourd’hui la beauté reconstituée, mais saisissante, du rituel semble satisfaire davantage.

Dans le monde gastronomique, on sait faire la différence entre les robes rouges d’un bourgogne, d’un bordeaux et d’un cahors. Mais, dans le domaine métaphysique oriental, la plupart de nos contemporains n’ont pas acquis d’expérience, ils n’ont pas encore dégusté. Ils s’essayent à leurs « rencontres de sagesse », selon leur niveau de connaissance du bouddhisme, parfois limité à quelques stéréotypes, à une simple étiquette.

La banalisation
La force du groupe, liée à l’effet de taille, tend à effacer ou à occulter ce qui pourrait être le cœur, tant de la pratique de méditation, que des relations humaines.

Mêlés à des dizaines d’individus issus comme eux de la société civile, voire à des centaines pour les sessions estivales, des aspirants laïcs transpirent ici sous une longue robe noire identique, uniforme. Rencontrent-ils beaucoup de leur propre spiritualité ? Préservent-ils ce qu’il y a en eux de plus doux, de plus délicat, de plus fragile ?
Ils baignent dans toutes ces vies fiévreuses qui se décompressent pour quelques jours. Ils partagent le même espace et le même temps avec d’autres Occidentaux qui tentent comme eux ce pari étrange : défaire toute une année de stress, d’embouteillages et de télévision en quelques semaines. Ils viennent chercher ce qu’ils ne peuvent en général eux-mêmes produire aisément, ni faire rayonner quotidiennement, dans leur propre vie urbaine. Chacun apporte ses demandes et son manque au séminaire de juillet. Les participants sont en quête de sagesse. C’est la manière polie de dire qu’ils n’ont peut-être pas grand-chose de paisible à donner aux autres autour d’eux en ces jours.

La méditation collective est supposée être une élévation.
Mais elle peut dans ce cas s’avérer une expérience bien banale, assez comparable à l’attente aux caisses du centre commercial. Le style du vêtement oriental, des bâtiments de bois, du rituel mystérieux est là heureusement pour cacher l’ordinaire derrière cette mise en scène choisie. Les contemplatifs qui pourraient apporter leur énergie au groupe prendraient le risque d’en ressortir moins équilibrés ou moins satisfaits. Ils se font rares. Certains fuient ce genre de concentrations. Attirent-elles quelques aficionados soucieux d’être admirés pour la superbe de leur allure énigmatique ?

Alors que les apprentis pensent se libérer du matérialisme et d’une souffrance diffuse, ils en reçoivent parfois un renforcement. Dans ce vaste groupe, ils côtoient les autres au cours des séances de méditation puis de prières. Ils s’ouvrent à la rugosité multipliée des vies comme la leur, et à l’abrasion qu’induit cette friction.
La sociabilité, parfois silencieuse, est encouragée dans ces périodes. Elle peut s’avérer convenue. La prégnance du groupe ne dénature-t-elle pas la démarche de chacun ? Ne transforme-t-elle pas un appel individuel pour le mystère en quelque impressionnante mascarade ? La méditation pratiquée ainsi n’est-elle pas plus affermissante qu’apaisante ?

La recomposition des rôles
Parmi les partisans occidentaux, certains tendent à inscrire la spiritualité du bouddha dans leurs manières habituelles, sans avoir à y renoncer, même si ces dernières sont moins compatibles avec les valeurs bouddhiques de détachement, de tolérance ou de silence. Ces disciples se donnent un « sédatif » spirituel, tout en cultivant par ailleurs leurs désirs ordinaires, sans se soucier des télescopages de sens qu’ils provoquent. Être sage ? Plutôt s’approprier la sérénité !
Plutôt avoir qu’être !
Le bouddhisme sert-il alors à certains de paracétamol spirituel, ôtant pour quelques heures la sensation désagréable d’avoir une vie pas tout à fait équilibrée ? Les exemples qui suivent posent à leur manière cette question.

Janus, venu d’Allemagne, séjourne pour une courte retraite de méditation en France. Il réside dans une modeste chambre d’ermitage, dans la proximité d’un nouveau monastère bouddhique. Sa Mercedes grise métallisée, une berline luxueuse dernier modèle, est là, stationnée devant. Elle attend, luisante, son propriétaire. Elle souligne le mystérieux paradoxe d’un Siddharta qui aurait gardé près de lui sa monture, un magnifique cheval, en espérant atteindre le détachement quand même.

Louve et Clafoutis habitent et travaillent dans la périphérie de Bucarest. Ils sont sympathisants d’un « bouddha vivant ». Ils aiment à revenir vers une lamaserie européenne qui vénère celui-ci, lors de leurs brèves vacances. Louve et Clafoutis ont tenu à m’expliquer longuement pourquoi l’insécurité urbaine les avait amenés à voter pour le candidat d’un parti politique de l’extrême droite auquel il est reproché de la xénophobie.

Lisebote, une jeune femme, chante dans un groupe amateur de rock. Elle s’époumone parmi les amplificateurs. Quelles vociférations ! Elle va « allumer le feu » ! Un fracas de décibels jaillit de la scène... Elle accomplit son stage lamaïste de silence et de jeûne chaque année...

Néobouddhistes
L’apparition en Inde d’une opposition au dalaï-lama laisse supposer, qu’après son décès, maintenir la cohabitation paisible de diverses écoles (du Vajrayana, en l’occurrence) sera plus difficile encore qu’aujourd’hui.

Le dalaï-lama est né en 1935. Sa santé s’est avérée plus fragile avec une hospitalisation à l’hôpital de Bombay (l’actuelle Mumbay) pour un traitement aux antibiotiques suite à une infection. Il ne pourra éternellement assurer ses fonctions sociales.

Dans la presse asiatique en langue anglaise les oppositions au dalaï-lama sont parfois qualifiées de « néobouddhistes » (neobuddhist). Mais le dalaï-lama n’est pas le seul visé. Avec lui, son jeune protégé, le lama karmapa, ainsi que l’administration du Tibet en exil sont critiqués par les néobouddhistes.

Qui sont ces "néobouddhistes" qui contestent la légitimité ?
Il semble qu’on y distingue au moins trois groupes distincts. Dans le premier on trouve les disciples de cette image courroucée qui a été exclue du panthéon officiel par le leader du Tibet. Ceux-ci revendiquent le droit à cette pratique...
Dans le deuxième groupe d’opposition au dalaï-lama, on a une autre école du tantrisme. Ses quelques maîtres et leurs disciples soutiennent une jeune « réincarnation », accoutrée du même affublement que le lama karmapa officiel, et... concurrente de ce dernier. Cette autre « réincarnation » n’ayant pas été reconnue par le dalaï-lama, ses dévots sont quelque peu « en froid » avec celui-ci et avec son autorité.
Dans le troisième des groupes, certains bonzes indiens d’une autre tradition semblent ne pas vraiment apprécier les exilés himalayens que sont le dalaï-lama et le lama karmapa. Un scandale aurait été provoqué, par mégarde, par le jeune karmapa, en pénétrant, chaussures aux pieds, dans l’enceinte sacrée d’un célèbre temple en Inde. Il s’agissait d’une cérémonie officielle où il était l’invité. Le vieux moine responsable de ces lieux verbalisa d’une amende le jeune lama karmapa qui avait omis de se déchausser. Cela fit grand bruit en Inde, et prit le nom amusant de « shoegate », faisant bien entendu référence au Watergate qui eut ailleurs des conséquences autrement plus importantes !

Les clivages qui existent en Asie se retrouvent en Occident. Les officiels qui s’opposent —on en trouve dans le Théravada, le Mahayana et le Vajrayana— sont le plus souvent issus des mêmes rites et des mêmes histoires. La séparation en plusieurs factions rivales résulte généralement d’une lutte pour le pouvoir après la disparition d’un vieux maître ou d’un bonze respecté. Dans la vacance qu’il laisse, la conviction qu’ont quelques disciples, convaincus d’être « héritier spirituel », ne manque pas de s’exprimer !
Certains d’entre eux conquièrent un pouvoir. D’autres... le perdent. Certains confortent leur position sur une partie seulement du réseau communautaire, s’il est « filialisé ». D’autres n’ont plus que quelques centres associatifs qui leur resteront fidèles. S’ils n’ont plus de base de repli, les plus entreprenants choisissent parfois de créer leur communauté.

Mais des conflits ouverts avec les institutions hostiles feraient fuir les nouveaux aspirants. Plutôt que de se déchirer en luttes fratricides, chacun préfère ignorer l’opposition et la critique venues d’autres factions schismatiques. Les communautés occidentales concernées sont donc tentées de se clore partiellement sur elles-mêmes. Elles se limitent alors à leurs propres réseaux de sympathisants.

Tendance nirvana
Que des contemporains choisissent leur voie méditative individuelle ou l’une de ces voies collectives dans un centre d’études, le choix courageux de vivre honnêtement leur engagement spirituel est bien leur voyage, et constitue sans doute l’essentiel de leur quête.

Car les autres, ceux qui ne prennent pas de risques, se contentant des brefs séjours de méditation payants, et du style nirvana avec le rosaire de graines de lotus en sautoir, ne peuvent guère entrer dans l’antique légende, ni vraiment de cœur, ni bien sûr par l’expérience personnelle. Ils se contentent souvent d’une adhésion de surface, comme si le prestige de la doctrine pouvait « améliorer » leur personnalité.
Certains s’y essayent.
Bien qu’ils puissent être des bobos, des « bourgeois bohèmes », qu’on ne les appelle pas boubous, comme on l’entend parfois. Tout diminutif à caractère discriminatoire est à proscrire. Ni vraiment bourgeois, ni vraiment bouddhistes, d’aucuns les identifient (trop sévèrement, nous semble-t-il) à leur « adhésion de façade » à un « spirituel de bimbeloterie ».
Leur voiture est choisie de couleur rouge, « afin d’être assortie à la robe de leur lama », délicate attention signalant, urbi et orbi, leur « dévotion envers le maître ». S’y expose, bien évidemment, le gros autocollant à l’emblème de leur lignée sur le pare-chocs arrière, pour la « connexion karmique » et, secrètement, pour une « protection surnaturelle, résultant de la bénédiction inconcevable du bouddha vivant »...
En week-end, arpentant la route communale à proximité de l’ermitage club, beaucoup arborent, qui un chandail rouge, qui une jupe bordeaux, qui une écharpe prune assortie, qui les identifient comme des sympathisants. Ignorant la politesse aimable des « bonjours », certains récitent ostensiblement des mantras, l’air lointain et mystérieux, lorsqu’on les croise en promenade sur cette voie publique, signifiant ainsi leur appartenance à l’aréopage des initiés.

Cette apparence n’est certes pas à prendre trop au sérieux, et elle peut déclencher chez le lecteur un sourire indulgent... Car la tolérance reste la clef la plus sûre pour comprendre ceux qui prennent ainsi, face aux autres, ces mines spirituelles pendant leur escapade méditative, avant d’être « badgés » dès le lundi matin en banlieue, dans quelque firme multinationale, qu’ils retrouvent comme ils l’ont laissée.

La déception peut faire partie du chemin
C’est donc de l’autre côté, chez ceux qui ont franchi le pas, qui ont rompu avec la compromission de l’argent, le frisson du pouvoir et l’exploitation des autres, qu’il faut chercher les chercheurs de vérité et nos observateurs qualifiés. Car ils ont appris de leurs propres erreurs, de la confrontation de leurs illusions avec la réalité que le temps décante, de la déception même dans leur quête d’absolu.

Le coût psychique à acquitter pour ces disciples est sans doute plus important que ce qu’ils avaient imaginé, voire au-delà de ce qu’ils souhaitaient a priori consentir. Ce prix moral à payer pour arpenter ce sentier millénaire est rarement connu des aspirants avant leur engagement. Ils le découvrent seuls, avec le temps, car du côté des robes safran, on montre les avantages d’être bouddhiste, rarement les inconvénients...

La vie du couple part à vau-l’eau, et rétrécit comme peau de chagrin lorsque chacun des deux époux veut absolument réussir le « détachement ». Mais on ne divorce pas beaucoup dans les milieux méditatifs et laïcs, lorsqu’ils sont aisés ! La maison du conjoint est désertée, et l’on acquiert seul(e) un « ermitage » individuel, manière polie de se séparer, sans le montrer trop ostensiblement alentour...

L’adhésion à un groupe hétérogène qui mêle diverses qualités, parfois ordinaires, devient lassante avec le temps, lorsque les apparences du culte ne séduisent plus...

Ces milieux sont accessibles aux clivages internes. Des moniales lamaïstes européennes supportent mal d’être sous la coupe des moines conformément à la vieille tradition himalayenne. Elles ne se résignent plus à laisser leur budget communautaire à une signature masculine et leurs projets, à une gouvernance virile étrangère à leur féminité...

Les disciples sont également tentés par le détachement de leur propre habitus culturel. Certains renoncent à une vocation professionnelle, à la sécurité que leur donnerait un métier, pour aller se préparer à deux retraites successives de trois ans.

Le décalage entre l’individuation et la nature collective de ces pratiques, encore récentes en Occident, amène aujourd’hui des interrogations nouvelles. Certains de ces nouveaux mouvements religieux ont des « cadres » fraîchement émoulus, et des « échelons intermédiaires » qui manquent un peu d’expérience.
Parfois maladroitement, parfois avec la part ubuesque propre à des structures figées, ils se proposent imprudemment de réduire l’ego des néophytes. Ils tentent de les faire rapidement lâcher l’attachement à leur identité personnelle.
Sur le chantier de construction d’une communauté, des bénévoles avaient repris cet impératif à leur compte. Parmi eux, certains avaient à cœur de « casser l’ego » (sic) des nouveaux venus. Cela permettait de faire effectuer les tâches les plus pénibles et les plus salissantes à ces derniers. Ceux-ci ne pouvaient guère protester. Le maniement de la bétonnière et de la brouette sous une pluie glaciale devenait par ce tour de passe-passe rhétorique le chemin de leur « purification karmique » (sic).
Lorsque ces malheureux se plaignaient de leur sort auprès d’un des responsables, celui-ci leur répondait (en substance) et avec onctuosité : « Au lieu de vous plaindre, vous devriez vous réjouir. Plus vous souffrez sur le chantier, plus vous purifiez les actes négatifs que vous avez commis dans des vies antérieures ».
Bien entendu il se dispensait lui-même de toutes ces tâches ingrates, son karma étant sans doute particulièrement « immaculé ».

Une spiritualité autonome, individuelle et inscrite normalement dans son temps, n’a certes pas besoin de cette « thérapie de choc » !

Méditer ? Bien sûr, mais quelle nécessité d’un groupe resserré dans un hall pour cela, et d’une posture figée, voire verrouillée, en tailleur ?

Partager ?
Évidemment, mais la vie, toute la vie est faite de partages. Le bouddhisme, avec toutes les nuances qui s’imposent compte tenu de sa pluralité, risque-t-il d’entrer en contradiction, au fur et à mesure des prises de conscience, avec la part fragile et précieuse de la personne ? S’approcher des nouveaux mouvements religieux inspirés du bouddhisme pour l’esthétique, une nourriture mieux préparée, l’atmosphère sacrée, le frisson bienfaisant d’une gnose concise, des compagnons sympathiques est certes tentant.
On peut ainsi mêler sa propre vie spirituelle à un groupe puissamment organisé. Mais on prend le risque d’y altérer cela même qui est au cœur de la recherche, ce « nous », qui sait dire « je », et qui se sait « lui-même », c’est-à-dire unique.

Un ancien disciple raconte sur un site Internet très documenté les deux anecdotes suivantes concernant le premier maître à l’origine de ses pratiques communautaires.
Ce bonze venu d’Asie contribua de manière essentielle à introduire la méditation en Europe et son nom devint célèbre pour cette raison.
Lorsque le sage partait en voyage, il lui arrivait de laisser une étonnante « boîte à idées » dans le groupe de ses élèves européens. Ce n’était pas vraiment pour encourager les suggestions, comme cela se trouve dans les grandes entreprises japonaises qui améliorent ainsi leurs méthodes de production. C’était, toujours selon cet ancien disciple, une sorte d’invitation à la « délation » !
Le maître, avant son départ, invitait ses élèves à dénoncer leurs petits camarades qui se conduiraient mal en son absence. À cette fin, il leur demandait de glisser des petits papiers accusateurs, indiquant tous les manquements, petits et grands, qu’ils constateraient, par une fente dans cette boîte ! Nous aurions aimé savoir si ces billets griffonnés furent nombreux.

Ce « sage », toujours selon la même source, aurait également élaboré avec quelques disciples un diagramme où ses élèves masculins étaient listés sur une colonne, ses disciples féminines en face sur une autre. Son jeu consistait à tracer des flèches reliant les noms pour esquisser le diagramme des nouveaux couples, ou plus précisément pour exposer les nouvelles relations intimes qui se formaient dans le groupe...

Dans certaines des écoles importées d’Asie, on trouve désormais le neos de l’Occident avec son improvisation approximative d’un nouveau style de vie spirituel. Il se fonde sur l’image millénaire, inaltérable et mystérieuse du bouddha. Il réduit généralement les significations complexes et contradictoires de son message à l’adhésion à quelques dimensions simples. La tradition venue d’Orient est alors réinventée, reconstruite, réinterprétée, refondue par les clercs. Les convertis n’ont pas plus d’enracinement culturel, familial ou traditionnel.
Parfois, ni les uns, ni les autres n’ont eu de contact prolongé avec le monde asiatique d’où provient leur tradition. Dans cette ignorance de l’original, il est clair que les copies occidentales peuvent différer sur le fond d’un modèle asiatique.

L’adhésion des disciples est alors comprise comme un acte d’engagement d’autant plus volontariste, presque comme un militantisme. En l’absence d’un contexte culturel et implicite partagé, la pureté doctrinale doit être explicitée, soulignée, voire martelée. Nos aspirants n’ayant pas eu d’éducation bouddhique raffinée, n’ayant pas grandi dans un territoire d’acculturation de longue date, leurs aînés opèrent un vigoureux recours à quelques « fondements », et répètent leur énergique catéchèse. Cela fonctionne plus souvent comme une casuistique, un argumentaire ou une manière de diriger les disciples, que comme une sereine découverte intérieure.

Dénuée d’habitus millénaire, de bases familiales, de racines sociales, d’éléments de comparaison, la quête de la vérité des disciples s’estompe ainsi au profit de l’adhésion au discours, aux pratiques apparentes et aux structures du groupe. S’affirment des formes de la tradition très réifiées, vidées du sens ancien et remplies inconsciemment d’un autre sens.

Ce néo sens palpite de désirs occidentaux et contemporains... de consommation d’alcool, par exemple. Ces désirs sont à peine voilés derrière le rite, qui suffit à les travestir et à les rendre acceptables et « spirituels ». Là, le whisky devient un nectar de grande félicité dans le temple. On peut y boire aussi de la bière et du vin. « Formidable ! » semblent dire les convertis. Ils sont séduits. On le serait à moins. Non seulement « ils vont vers l’illumination », puisque leurs « maîtres » le leur ont promis, mais en plus ils y vont en se rinçant le gosier. Ils font d’une pierre deux coups.

Le culte est hiératique.
Il fait sacrément authentique. Il impressionne. Mais il est permissif et séduisant, accommodant les besoins, les pulsions, les désirs occidentaux. Sinon un temple tout neuf, gigantesque pâtisserie de béton armé, bardé à l’intérieur de placoplâtre peint, resterait vide d’amateurs. Son mobilier de contre-plaqué est luisant de peinture glycéro vermillon. Quant au millier de statues de plâtre creux qui débordent de dorure sur les autels, elles ont été multipliées avec des moules souples en silicone, et remplies de mantras reproduits à la photocopieuse.

Quel paradoxe :
La recherche de la sérénité pourrait-elle aussi connaître, comme d’autres traditions, certaines tentations de se clore ? Le message du bouddha servira-t-il alors de dogme et non plus de gnose ? La fontaine orientale des mystérieuses pratiques de méditation coulera-t-elle encore, ou est-elle déjà pétrifiée ? Des écoles qui sont à bout de souffle en Asie peuvent-elles encore promouvoir un humain en révélation progressive, et accepter les individus d’aujourd’hui ?

L’humanité, dans sa complexe, diverse et foisonnante évolution, échappera-t-elle à l’idée théâtrale d’une félicité jalousement gardée par des maîtres à penser revêtus d’une longue épitoge ? Selon nous, la quête essentielle passe par soi, par les autres, et n’a pas besoin de grand décorum...

La perte d’audience des bouddhismes en Asie, le déclin probable, sinon inévitable, de leur mode en Europe, ne sont donc pas seulement le fait de l’apparition progressive d’un monde plus scientifique, plus technologique et plus informé.
Comme l’écrit le prix Nobel de littérature V.S. Naipaul (cité en 2002 par l’hebdomadaire Newsweek) au sujet de la quête humaine du bonheur : « l’idée de l’individu, de la responsabilité, du choix, de la vie intellectuelle, de la vocation, de la perfectibilité et de l’accomplissement : c’est une idée humaine immense. Elle ne peut pas être réduite à un système fixe. Elle ne peut pas générer du fanatisme. Mais on sait qu’elle existe et, à cause de cela même, les autres systèmes plus rigides éclatent finalement... »

Que des systèmes bouddhiques rigides éclatent déjà sous la pression de leurs schismes et de leurs contradictions, la statue admirable sourit... comme si de rien n’était.













TABLE



PROLOGUE
I LÉGENDE DU BOUDDHA : DU MYTHE À L’HISTOIRE
II PARADIGMES BOUDDHIQUES : TROIS VISIONS DU MONDE
III BOUDDHISME DES ANCIENS : LE THÉRAVADA
IV BOUDDHISME DU GRAND VÉHICULE : LE MAHAYANA
V BOUDDHISME TANTRIQUE : LE VAJRAYANA
VI BOUDDHISME AUJOURD’HUI
VII BOUDDHISME DEMAIN ?
VIII ART & FASCINATION
IX NÉO FONDAMENTALISTES [4]



Rosée parfumée,
Gouttes qui s’évaporent.
Matin, le soleil,
Évaporées.


Aux jardins verts
Le lotus bleu
Parmi les anciennes sources
Fleurit ;


Toujours silence et inaltéré,
Narcisse découvre le reflet,
Visage qui sourit
Auprès d’une fleur

—Miroir






remerciements de l’auteur
à celles et ceux qui
ont souri au détour de
ce sentier.








Notes :

[1] le mot « courroucé » est très utilisé dans les traductions en français (« wrathful », en anglais). « Courroucé » est sans doute un euphémisme, voire une aimable politesse. Selon le caractère plus ou moins terrifiant de diverses effigies peintes ou sculptées, d’autres adjectifs — « irrité », « furieux », « furibond », « féroce » — seraient, certes, moins flatteurs.
[2] Une dizaine de noms a été inscrite, semble-t-il, sur la liste des membres dans les statuts de la congrégation. La communauté a vraisemblablement payé des cotisations sociales pour quelques moines... Ainsi à peine 10%, peut-être, des eurolamas bénéficient ici, et à ce titre, de l’assurance maladie.
[3] Selon la définition  (didactique) de ce terme donnée par le Petit Robert, édition 2002, p.1096.
[4] voir la note 7 p.108 concernant ce mot.


Copyright Marc Bosche 30 juillet 2002 pour la présente édition numérique.


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La sociologie d'une lamaserie HTML : Un bouddha Nommé Désir http://encyclopedie-du-bouddhisme-3.blogspot.com/ 115p.


Le récit d'une expérience monastique HTML : Le Voyage de la Cinquième Saison http://encyclopedie-du-bouddhisme-4.blogspot.com/ 103 p.

Nouveau, fiction spéculative, la rencontre du bouddhisme et de l'occident, premiers bilans, sous HTML et PDF : Néo bouddhisme, 280 pages, 28 mars 2006. http://encyclopedie-du-bouddhisme-5.blogspot.com/



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